Lettre ouverte : le leadership féminin, pour un futur égalitaire dans le monde de la Covid-19 ?

A l’occasion de ce 08 mars 2021, nous vous partageons une lettre ouverte rédigée par Lucie, notre stagiaire :

Durant cette crise de la covid-19, nous avons entendu parler des femmes au front, celles qui représentent le premier rempart face à cette crise sanitaire. Dans le ‘monde d’après’ leur travail sera-t-il socialement valorisé et suivi d’une augmentation salariale en corrélation avec leur utilité publique ?

Nous avons aussi entendu parler de celles qui ont géré la crise au niveau politique, et qui sont à la tête des pays qui s’en sortent le mieux (par exemple : le Danemark, l’Éthiopie, la Finlande, l’Allemagne, l’Islande, la Nouvelle-Zélande et la Slovaquie). Il est aussi intéressant de se demander quel a été leur rôle ?  Aucune généralité n’est bonne à être faite, mais quelle sera leur place dans le monde politique d’après ? Sophie Wilmès, après être devenue la maman des Belges lors d’une situation de crise ingérable, devra-t-elle céder la place à nouveau aux guéguerres des hommes politiques ? Les femmes sont-elles bonnes à nettoyer le chaos une fois que les garçons abandonnent la salle de jeux ? On pense à Theresa May durant le Brexit par exemple…  Quel avenir politique est réservé aux femmes une fois que la tempête est finie ?

Au niveau du leadership féminin (thème défini par ONU femmes à l’occasion de cette journée du 8 mars 2021), ces politiciennes sont accompagnées d’autres femmes qui, petit à petit, ont monté l’échelle du pouvoir et se retrouvent à des postes influents. Que signifie l’augmentation de ces femmes à se faufiler dans le monde des hommes ? Où sont les ‘autres’, où se trouve l’autre moitié de la population ? Qu’est-ce que cela signifie-t-il pour le combat féministe ?

Ce combat ne peut pas être divisé de la lutte antiraciste, de la lutte contre le validisme, de la lutte pour une justice sociale, la lutte contre l’homophobie, la lutte contre la transphobie, la lutte contre la putophobie, la liste des luttes contre tout autres types de discriminations est si longue qu’il est impossible de toutes les citer. Nous ne serons libres qu’une fois que toutes les femmes auront accès à cette égalité. Toutes.

Une analyse intersectionnelle de ce leadership féminin permet de mettre en perspective la notion de « leadership » et son rapport au féminisme ainsi que de se poser des questions sur les avancées que cela représente pour toutes les femmes.

L’histoire est une notion clé afin de pouvoir comprendre les enjeux actuels de manière suffisamment complexe. L’histoire du féminisme est, comme toute l’histoire du monde occidental, marquée au fer rouge par le racisme et par les inégalités sociales.

Si le féminisme d’aujourd’hui se veut être la lutte pour toutes les femmes, il est primordial de savoir reconnaitre que cela n’a pas toujours été le cas.  Ce combat fut, et est encore dans certaines situations, un combat où les intérêts d’une élite blanche et privilégiée sont les plus écoutés.

Un privilège en entrainant un autre, les femmes composant le leadership féminin actuel ont pu « réussir » car elles font partie des femmes privilégiées qui ont eu l’opportunité de pouvoir gravir les échelons.

Elles ont pu le faire à la fois, car elles se sont battues pour y arriver, mais surtout, car elles ont eu le droit, grâce à leur privilège, d’arriver jusqu’à là et d’être reconnues. Ces leadeuses féminines ont eu le privilège de pouvoir avoir leur « chambre à soi » dont parlait Virginia Woolf, elles ont eu accès à une chambre avec un verrou sur la porte afin qu’on les laisse tranquilles et qu’elles puissent librement prendre le temps de penser. Elles ont eu accès aux nombres de livres suffisants afin de s’instruire et de pouvoir réfléchir à leur guise sur leur vie et sur le monde. Elles n’en sont pas moins actrices de leur réussite.

Elles sont pourtant à la fois la preuve que le combat mené jusqu’ici à un sens, mais elles sont également la preuve que l’égalité de genre ne sera atteinte qu’une fois que chaque femme aura l’occasion d’accéder à cette chambre, puis aura la possibilité d’être reconnue, sans être discriminée à cause d’un statut, celui de femme, mais également celui attribué à ses origines, à sa culture, à son apparence, à son orientation sexuelle, à son handicap, de sa situation économique, de sa religion … Les discriminations sont multiples, n’ont pas de hiérarchie « d’importance » et doivent être nommées pour être combattues.

Alors que faire ? Comment agir ?

Apprendre de l’histoire, puis aborder le féminisme d’une manière intersectionnelle semble être une route intéressante à emprunter afin de tendre vers l’égalité.

Sur cette route vers l’égalité la mise en avant de la parole de celles qui vivent de multiples discriminations est primordiale.

Engageons-nous sur le chemin de l’écoute et de la rencontre avec ce que nous ne connaissons pas, écoutons, apprenons, promouvons leur parole.

Soyons conscientes que nos privilèges sont source de discrimination pour d’autres femmes, situons-nous afin d’accepter d’y renoncer et d’agir contre la perpétuation des injustices. Pensons-y dans notre consommation, qui paye le prix de la fast fashion, de la production de notre nourriture ?

Pensons-y dans nos mots, dans nos actions, défendons nos sœurs quand nous entendons qu’elles sont dénigrées devant nous.

Pensons-y dans nos mots, dans nos actions, dans notre respiration.

Faisons de ce 8 mars une journée de lutte et d’apprentissage : profitons de cet évènement pour reconnaître nos privilèges, puis enrichissons-nous par l’apprentissage et l’écoute du vécu de celles avec un parcours différent.

Une réelle sororité ne peut que passer par la rencontre avec ‘l’autre’, soyons actrices de cette rencontre.

Lucie Xhrouet

Cliquez ici pour retrouver un récapitulatif non exhaustif des évènements organisés pour le 8 mars.